Le Violon d'Ingres est une photographie de Man Ray, (né Emmanuel Rudzitsky ), un peintre américain, photographe et réalisateur de films. Il fut un des acteur du dadaïsme puis du surréalisme. Ce célèbre portrait à été réalisé en 1924, quelques années après que l'auteur se soit installé à Paris. Il en existe plusieurs représentations. Man Ray utilise une technique fréquemment utilisé dans le surréalisme ; l'artefact, une photographie argentique en noir et blanc sur laquelle on dépose des traces d'encre. La femme représentée est vue de dos ce qui suscite l'étonnement et l'intrigue.
En effet, le cadrage est serré, le plan est frontal mais c'est une vue de dos. Cette photographie en noire et blanc met en scène une femme dont les cheveux son enveloppés dans un foulard. Son visage de profil nous laisse à peine entrevoir son maquillage . Aucune expression ne transparaît ; elle ne sourit pas, elle est neutre. Elle semble à l'aise, elle pause de façon très professionnelle, comme si elle n'en était pas à sa première fois. Elle est assise et il est impossible de distinguer ses bras et ses jambes, ce qui rend le sujet abstrait. Le faible éclairage uniforme, venant de la droite dessine les courbes de son corps, allant de sa nuque jusqu’au bas de ses reins. Le premier plan est éclairé, à l'inverse du second qui reste dans l'ombre. Les bordures de ses épaules forment des lignes continues avec celles de son dos. Le blanc du dos contraste avec les deux ouïes très noires et le caractère sombre du fond de la scène, les ouïes marquent un creux , une obscurité alors que le dos est tout blanc. Elle est nue, et n'a pour seules parures qu'un draps recouvrant ses jambes et une boucle d'oreilles. Il n'y a aucun décor, aucun objet qui pourrait donner des indices, il est difficile de savoir si elle est assise au sol ou sur un lit, seul un draps à carreaux sous elle, est visible. Cette femme semble avoir moins de trente ans, mais il est difficile de déterminer son age étant donné qu'elle est de dos et qu'on ne voit qu'une infime partie de son visage.
Néanmoins, on peut discerner en bas de son dos, au niveau de ses reins ; ce qu'on appelle les ouïes d'un violoncelle. Cela ressemble à un tatouage mais en y prêtant un peu plus attention on peut voir qu'elles ont été rajouté après que la photo est été prise. A travers le blanc et le noir, on aperçoit la texture du papier. Les motifs noirs, ainsi que la forme de son corps font immédiatement penser à un instrument de musique, plus précisément à un violon. On peut alors se demander quel est le rôle de cette femme? Qu'elle est sa profession? Au premier abord, on peut supposer qu'il s'agit d'une musicienne, elle fait sûrement partie d'un orchestre. Elle appartient au monde de la musique, c'est pourquoi elle à voulu que cet artiste face un portrait d'elle, en se mettant en scène comme si son corps et son instrument ne faisait qu'un. De plus, elle pose quasiment nue ce qui laisse à penser qu'elle qu'elle connaît le photographe.
Cependant, lorsque l'on connaît les conditions de cette photographie, on en fait une toute autre interprétation. Le photographe était un admirateur du peintre Jean Auguste Dominique Ingres ; lui même passionné de violon. Ce cliché rend hommage à cette passion devenue l'archétype du hobby. On remarque d'ailleurs des similitudes avec un tableau de Ingres : Le Bain Turc, notamment sa coiffe. Ici, Man Ray met en scène Kiki De Montparnasse ( née Alice Ernestine Prin , surnommée Reine de Montparnasse) , modèle, muse et amante d’artistes célèbres, chanteuse, danseuse, gérante de cabaret, peintre et actrice de cinéma, elle fut un personnage célèbre durant l’entre-deux guerres (1921-1939).
Il laisse penser que les femmes, et en particulier le modèle de sa photographie, étaient pour Man Ray, son propre passe-temps de substitution .
Grâce aux deux ouïes dessinées à la mine de plomb et à l’encre de Chine, le corps est ici métamorphosé en violon. Il tente de révéler l’érotisme cette jeune femme, d'à peine vingts ans, et sa propre passion : elle est son violon d’Ingres. Son corps et l'instrument ne font qu'un. Le corps devient le lieu même de la résonance et donc de l'émergence du son ; ce n'est plus le corps qui ressemble au violoncelle, mais l'inverse. Pour comprendre, il faut remonter à la renaissance italienne où, avec la création des instruments de cette famille des cordes, on cherchait à produire un instrument qui rendrait un son au plus proche de la voix humaine. L'instrument tenu par son musicien communique ses vibrations au corps et créé ainsi « le son du corps ». Créer une œuvre dont la signification paraît directement perceptible, tout en amenant le spectateur à s'interroger sur de multiples interprétations, est un principe fréquemment repris chez es surréalistes.
Ce portrait met en avant la beauté d'un être mi-femme, mi-instrument, dont les formes et les courbes du corps triomphe de leur esthétisme. Le corps et la musique ne font qu'un,exaltant les sens et laissant à l'imaginaire une libre interprétation. C'est selon moi une très belle métaphore de la beauté, de la féminité. Cette femme apparaît comme délicate, mystérieuse et sensuelle, tout comme peut l'être la mélodie d'un violon. Man Ray à façonné le corps de Kiki de Montparnasse tel un musicien pour en dégager toute sa beauté. Rendant hommage à Jean Auguste Dominique Ingres, l'auteur fait le portrait de sa maîtresse en lui rajoutant les ouïes d'un violon sur les reins, témoignant de son appartenance au surréalisme.
Très bonne analyse car elle est vraiment complète et on comprend bien les inspirations de Man Ray pour cette oeuvre
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